Seattle est au rock n'roll ce que Bethléem est au christianisme.
Spin Magazine (1992)

On a besoin qu'il arrive à nouveau quelque chose comme ça - pour changer la face de la musique. Tout de suite!
Mike Inez (Alice In Chains)

22/01/2012

Seattle Grunge's Anecdotes : Dan Peters entre Mudhoney, Nirvana et les Screaming Trees

1990. Dan Peters est et restera à jamais "The batteur Of Mudhoney". Mais c'homme là est bien plus que cela. Dan Peters est une figure essentielle, indélébile, voire complètement indétronable, du mouvement Grunge. Dan Peters a joué avec un paquet de groupes du North West, à commencer par Bundle Of Hiss avec son pote Kurt Danielson (futur TAD), un combo purement proto grunge dans le son et l'attitude, et annonciateur à ce titre de bien des bonnes choses... Ouaip, bien sûr il assura derrière les futs chez bien d'autres : Feast, Love Battery, the Fastbacks ou même Valis avec Van Conner... Dan Peters n'a peur de rien, et quand, au court de l'année 1990, Steve Turner décide de mettre en stand-by Mudhoney pour reprendre ses études, Dan, lui, profite de l'opportunité pour voir si il peut tâter de la grosse caisse ailleurs... Enfin, soyons sérieux : ailleurs ici, à Seattle... C'est chez Nirvana qu'il va frapper à la porte, pour participer à une période cruciale de l'histoire du groupe, celle qu'on peut qualifier de "pré Nevermind", celle ou l'on sent la hype autour du groupe monter de toutes parts... Nirvana a l'époque vient de lacher Chad Channing, son batteur historique, et Dale Crover des Melvins assure l'intérim.

Dale Crover (batteur des Melvins) : J'ai joué quelques shows avec Nirvana. On a ouvert pour Sonic Youth sur la côte Ouest. Ils parlaient de me faire jouer sur leur prochain album, mais ils ont finalement décidé de prendre Danny de Mudhoney.

Nils Bernstein (publiciste de Sub Pop) : Il y a eu cette période ou Dan Peters était avec Nirvana, et de mon point de vue ils étaient énormes avec lui. C'est vraiment un batteur intéressant, qui se distingue des autres. C'était une période vraiment excitante - juste entre Bleach et Nevermind.

Dan Peters : Une nuit, c'était au Vogue, j'ai rencontré les copines de Kurt (Cobain) et Krist (Novoselic), Tracy et Shelli, et elles m'ont dit que Nirvana cherchait un nouveau batteur. Steve (Turner) avait décidé de reprendre les cours, donc je leur ai dit que j'étais intéressé. Quelques jours après, j'ai eu un appel de Kurt, et j'ai commencé à jammer avec ces gars. Mais les répét' n'étaient pas vraiment fun, comme chez Mudhoney, où on prenait toujours du bon temps en buvant quelques bières. Mais j'étais heureux de la perspective d'enregistrer ce morceau, Sliver, avec eux.
Kurt Danielson (bassiste de TAD) : A l'époque on enregistrait des démos avec Jack Endino. Pendant la pause de midi, Nirvana est arrivé - Krist, Kurt et Dan - et ils ont enregistré Sliver. Personne ne l'a su, mais tout le matos qu'ils ont utilisé pour enregistrer ce morceau était celui de TAD. On était super heureux de leur laisser l'utiliser, parce que Krist nous avait préparé un énorme spleef qu'on a fumé pendant qu'ils enregistraient.Dan Peters : Le seul show que j'ai joué avec eux, c'était au Motor Sports International Garage à Seattle. Ce concert a été en quelque sorte un élément fondamental de l'histoire du groupe.

Le concert du Motor Sports Garage, un parking couvert qui accueillait au début des 90's un paquet de concerts rock, ce avant d'être démoli, est resté dans les annales des moments les plus puissants de la carrière du groupe. On est le 22 septembre 1990, et l'affiche annonce Nirvana, Melvins, Dwarves et Derelicts. C'est une première pour Nirvana qui dévoile un morceau de son futur album : In Bloom. Dans l'assemblée se trouve un inconnu débarqué à Seattle pour voir ses potes des Melvins et jeter un œil à ce nouveau groupe dont on promet qu'il sera "the next big thing" et avec qui il est déjà en contact : Dave Grolh commence à se dire qu'il pourrait prendre la place de ce fameux Dan Peters...


Julianne Andersen (manager des Supersuckers et de Gas Huffer) : Le concert du Motor Sport? Un grand moment. C'est là que j'ai su (que Nirvana allait exploser).

Jonathan Poneman (co-fondateur de Sub Pop) : C'était un show énorme.

Alice Wheeler (photographe) : Le concert qui a tout changé était celui du Motor Sports Garage - d'un seul coup, il y avait des tonnes de gens, et tu devais demander des pass backstage.

Malheureusement pour lui, Dan Peters est un batteur plutôt "garage". Pas du tout un cogneur. Or Kurt Cobain cherche un vrai frappeur de futs comme peut l'être Dale Crover ou ce gars que lui ont présenté les Melvins : Dave Grolh... Ses jours sont comptés chez Nirvana...

Dan Peters : Le jour juste après le show, il y avait une interview qui était programmé avec une radio de Tacoma, et les gars ont insisté pour que je ne vienne pas. Mais je leur ait dit "Non non je viens". J'y suis allé et j'ai fais l'interview et la séance photo. Mais il y avait ce gars qui était là, il était le batteur de Scream, et il attendait sagement que ça se finisse. Et personne ne m'a rien dit. C'est quelques jours plus tard, en parlant d'une éventuelle tournée anglaise, que Kurt m'annonce qu'ils ont un nouveau batteur. Ce gars de Scream, Dave Grolh. J'ai dit "ok, c'est cool". J'étais un peu pris de court, mais vraiment libéré, parce que Mudhoney avait quelque chose de spécial que je ne retrouvais pas chez Nirvana. Mais avec du recul, je me dis "Aww, Jesus". Ce qui m'a frappé à ce moment là, tout ce qu'ils avaient à faire était d'être honnête avec moi - de ne pas faire les fiottes. La communication n'était vraiment pas leur fort. J'ai appris plus tard que Dave avait répété avec eux avant le show du Motor Sports. Il était surement plus préparé que moi à jouer ce concert.

Juste après ça, Jonathan Poneman m'apprend que Mark Pickerel quitte les Screaming Trees. Je me suis dis "Ok, j'ai du temps, j'adore les Trees". Puis je reçois un coup de téléphone : "Salut, j'ai entendu dire que tu étais intéressé à jouer avec nous". Et j'étais là : "Ouais!!??". Et le gars au téléphone se met juste à rire. "C'est quoi ce bordel, tu te fous de ma gueule?" je lui ai demandé un couple de fois. Et finalement il me dit "C'est Lanegan". Mark est un mec vraiment drôle. Il voulait me foutre les boules.

Gary Lee Conner (guitariste des Screaming Trees) : On a eu cette tournée avec Dan, ça se passait pas trop mal, jusqu'au moment ou le premier de nos deux vans, celui dans lequel Mark était, a eu un accident sur la route. C'était dans le Wyoming, en plein hiver, et il a glissé sur la glace. On a tous cru qu'ils étaient morts. Considérant la gueule du van, c'est un miracle que personne n'ai été sérieusement blessé. A partir de là, Mark s'est remis à boire. Ça a été le début d'années de galère.

Dan Peters : A Chicago, Lanegan a recommencé à boire. On était parti faire les courses avec Mark et Van, et Mark est revenu avec trois bières dans les mains. J'ai ricané en voyant ça, et il m'a demandé "Quoi, y'a un problème?". Et je lui ai répondu : "Qu''est ce que tu fais?". "Je vais boire ça". "Vraiment? Alors je vais en prendre aussi".

Le concert de Chicago marque le début de la fin pour cette tournée, Mark Lanegan quittant la scène après deux morceaux. La tournée sera définitivement annulée en Floride. C'est le retour aux affaires à Seattle, ou Dan reprend contact avec son groupe, le seul, l'unique : Mudhoney.

Dan Peters : Mudhoney avait enregistré "Every Good Boy" juste avant que Steve reprenne les cours, et au retour de la tournée des Trees, le disque était prêt de sortir. Mais en même temps les Trees était pas loin d'enregistrer un nouveau disque, donc j'ai participé aux démos avec eux. C'est là que j'ai réalisé que je devais prendre une décision. J'ai demandé à Steve ou il en était. "Veux tu partir en tournée ou rester à l'université?". Il m'a répondu qu'il pensait qu'on pouvait tourner. C'était la réponse que j'attendais. Autant j'ai adoré travaillé chez les Trees, autant Mudhoney était mon groupe.

14/01/2012

Seattle Grunge's Anecdotes : Smell like Grunge Spirit, ou les dessous malodorants du Grunge...

Danny Bland (guitariste de Catt Butt et bassiste chez les Dwarves) : Les L7 étaient des trous du cul. C'était des mecs. Bordel, elles puaient autant que nous.

Megan Jasper (réceptionniste chez Sub Pop, devenu depuis vice présidente, chanteuse de Dickless) : Je t'ai déjà parlé de ce classement qu'on avait chez Sub Pop, des groupes qui puaient le plus? Non? L7 y était, mais celles qui battaient tous les records, c'était les filles de Babes In Toyland. Un jour qu'elles étaient dans les bureaux de Sub Pop, Geoff Kirk, notre comptable à l'époque, n'a pas pu s’empêcher de les suivre partout pour les arroser avec un spray à chiotte spécial fraicheur. Nirvana était aussi dans la liste. C'était surtout Chad, le batteur. Une fois qu'ils étaient là, ça puait tellement - c'était au delà d'une odeur purement humaine; ça sentait comme une espèce de levure - que tout le monde en était à essayer d'ouvrir les fenêtres. J'ai dis "qu'est ce que c'est que cette odeur?" mais je pensais pas du tout que ça venait de quelqu'un. Et Chad m'a répondu "Oh, je pense que c'est moi".

Le point sur l'agenda live de l'été : Soundgarden, Mudhoney, Pearl Jam, Melvins, Afghan Whigs, Mark Lanegan...

L'été de folie que voilà!!!!

Soundgarden, la grosse affaire. Confirmé début janvier chez GDP... Ca va s'arracher comme du petit pain c't'affaire là, même si la place en fosse avoisine les 56€, ce qui coute quand même un rein... Z'ont pas honte les gars de mettre des prix pareils... Bon, même si d'aucun confirment que GDP est souvent de mèche avec l'orga du Hellfest qui a lieu 15 jours plus tard, j'ai comme mon petit doigt qui me fait de plus en plus hésiter à mettre un kopek sur la venue du groupe à Clisson cette année. Comme dit précédemment, c'est mathématiquement faisable pour Matt Cameron, mais ne lui laisse que peu de repos avant d'attaquer la tournée PJ 20 qui commence le 20 justement... Sans compter que pour le moment, la tournée s'articule plutôt autour de la fin mai début juin (rien après le 7). D'un autre coté, aucune date n'a encore été révélée chez nos amis rosbeefs, ce qui est louche. Ni en Espagne d'ailleurs, ce qui est doublement louche... Sachant que le Download a lieu du 8 au 10 juin, on se rapproche quand même dangereusement du 15, date du Hellfest... A voir donc, j'espère de tout cœur me tromper... PS : (03.02) - Point de Soundgarden dans le programme officiel du Hellfest...

29/05/2012 - Paris, Zénith

Mudhoney nous sort une petite tournée européenne de derrière les fagots, avec pas moins de 5 dates en France... Dont la seule parisienne dans le cadre du Villette Sonique le 27 mai, soit deux jours avant Soundgarden... Ça promet!!! Ce sera en extérieur, et c'est à priori accès libre!!!! Manque plus que le dimanche soit ensoleillé et que les quelqu'autres groupes soient tout aussi sympas, et ce sera le pied intégral...

20/05/2012 - Lyon - Villeurbanne, Transbordeur
25/05/2012 - Metz, Chapelle / Caveau des Trinitaires
27/05/2012 - Paris, Villette Sonique
30/05/2012 - La Rochelle, Sirène
01/06/2012 - Marseille, Cabaret aléatoire de la Friche
29/05/2012 - Louvain, Het Depot pour nos amis belges

The Melvins nous font le plaisir de repasser cette année en France, et ce sera... à Villette Sonique aussi, mais le samedi 26 du coup... Et accompagné svp de... Sleep, groupe mythique précurseur d'un genre que perso j'adore : le stoner... Putaing, 26€ pour voir ces deux groupes, c'est un bonheur... Les places sont déjà en vente. Oh bordel, vous imaginez : Melvins, Mudhoney, Soundgarden en quatre jours... La folie furieuse!!!!!! Même dans mes rêves les plus fous, ça serait jamais arrivé!!!

26/05/2012 - Paris, Villette Sonique

Pearl Jam, on le sait tous, présent au Mainsquare à Arras, festival qui pue la frite rance à douze km et où la tenue de chaussures de chantier est de rigueur vu le nombre de péquins au m²... Il n'en reste pas moins que c'est PJ, un des meilleurs groupes live de tous les temps...

30/06/2012 - Arras, MainSquare Festival
29/06/2012 - Werchter Festival pour nos toujours amis belges

The Afghan Whigs se reforment, repartent en tournée, et... ne passent pas par la France pour le moment, mais y'a moyen de faire un saut en Belgique ou au Luxembourg pour les voir... Afghan Whigs, c'est encore un de ces groupes qui n'ont pas connu la notoriété à laquelle ils auraient pu légitimement aspirer. Vraiment un truc à voir je pense... Z'ont l'air d'avoir quand même une bonne cote, parce que le concert de Bruxelles, et ben il est déjà complet. La loose...

11/06/2012 - Luxembourg, Den Atelier
13/06/2012 - Bruxelles, Cirque Royale (déjà complet)

Mark Lanegan n'a pas oublié sa promesse de passer nous voir, après nous avoir snobé pour sa tournée européenne de mars-avril. C'est à Rock en Seine qu'il vient d'être confirmé. Quel jour?, on ne le sait point pour le moment. Présent également à la Route du Rock à St Malo, au sein d'une belle affiche de groupes indés, de mon point de vue, ça vaut bien le coup :

11/08/2012 - St Malo, Festival Route du Rock

24-25-26/08/2012 - Saint Cloud, Festival Rock en Seine

Voili voilou pour les news du moment!!!! Attendez : là, c'est proprement hallucinant, cet été c'est tout le Seattle Sound qui passe en France!!!!! On n'avait jamais vu ça, et pire, on n'aurait jamais imaginé que ça puisse exister un truc de ce genre!!! Si certains d'entre vous veulent se prendre un petit verre en terrasse avec moi et Sly de Seattle Sound avant les concerts de Mudhoney, Melvins ou Soundgarden, c'est possible... Me contacter en laissant un message dans les commentaires...

07/01/2012

The Blackouts, à mi chemin entre grunge et indus

The Blackouts étaient probablement le meilleur groupe à jamais être sorti de Seattle. Amazing. Jim Tillman (bassiste des U Men et de Love Battery)

Larry Reid (manager des U Men) : The Blackouts étaient probablement les précurseurs de ce qui a été plus tard connu comme le Seattle Sound. Ils n'étaient pas un groupe punk rock standard, basique - ils avaient un son plutôt sophistiqué et un vrai sens de l'instrumentation. Un groupe vraiment influent.

Les Blackouts se forment en 1979 sur les cendres des Telepaths, un des premiers groupes punk de Seattle, et enregistrent dans la foulée un premier single intitulé Music : 528 seconds. Le groupe est alors composé de Eric Werner au chant, Bill Rieflin à la batterie, Roland Barker au synthé et Mike Davidson à la basse.

Bill Rieflin (batteur des Blackouts, puis de Ministry et REM) : Je me souviens quand Eric Werner, après le split des Telepaths, m'a demandé si je voulais monter un nouveau groupe avec lui et le bassiste des Telepaths. Je détestais cette idée - être dans un "rock trio". Donc j'ai dis non, sauf si il trouvait un quatrième élément. Robert Barker, avec qui je vivais, jouait du synthé et du saxo. Il était un peu réticent au début, mais on ne l'a pas lâché jusqu'à ce qu'il accepte. C'est comme ça que les Blackouts se sont formés. Paul Barker à rejoint le groupe en 1981 - il vivait en Allemagne. (...) Les Telepaths étaient un groupe punk plein d'intensité et de puissance. on voulait dépasser ça, revenir à une simplicité un peu poisseuse. On était plus dans Gang Of Four ou les premiers Talking Heads.

C'est véritablement l'Ep Men In Motion (1981) qui va définir le son du groupe. Hurlements dissonants et morceaux déstructurés. No Wave en somme. C'est l'époque ou le groupe trouve sa véritable identité, par la force des choses. Mike Davidson lâche l'affaire, lassé de devoir batailler pour trouver de quoi tourner. Il est donc remplacé par Paul Barker, frangin de Roland de retour d'Allemagne. Surtout, le synthé de Roland Barker est volé lors d'un enregistrement de son autre groupe, les Young Scientist, au Showbox. Roland s'attelle donc par défaut à son deuxième instrument : le saxophone.

Bill Rieflin : Les Blackouts ne seraient jamais vraiment devenu les Blackouts si on ne s'était pas fait volé notre matos. On a perdu Mike au même moment. Par la force des choses on est devenu un "trois pièces" : basse, saxo, batterie. Ça a vraiment reconfiguré, redéfini ce qu'était les Blackouts. Notre son en a été réduit à l'essentiel, il a gagné un caractère plus tribal. Il est devenu plus condensé, unique en un sens.

Daniel House (bassiste de Skin Yard, fondateur de C/Z Records) : Leur musique avait un coté tranchant, angulaire, angoissant - comme du verre brisé.

C'est au même moment que le groupe gagne son statut de groupe "live", ce grâce à des performances scéniques remarquables et à un fort sens de l'imagination. Une touche artistique qu'on retrouvera dans nombre de leurs futurs shows et vidéos à venir.

Paul Barker (bassiste des Blackouts, Ministry) : On a joué un show dans ce club horrible sur Pionner Square, le Baby's O's. On ouvrait pour un groupe de bar merdique (qui s'avéra être un obscur groupe power pop du nom de Heats). On n'était pas connecté à cette scène là, on était parti intégrante de la scène punk. Donc on s'est dit : "si on doit ouvrir pour ce foutu groupe, alors essayons de faire quelque chose de génial. Notre manager avait mit la main sur une dizaine de litres de sang de cochon chez un boucher, et on a donc décidé qu'on se couvrirait de cendres et de sang de cochon, et qu'on jouerait comme ça. On l'a fait et c'était incroyablement affreux (rires). je me souviens pas comment le concert a été perçu, mais c'était vraiment crade. Mais bon, au final est ce que quelqu'un y a trouvé quelque chose à redire à l'époque?

Dave Dederer (guitariste des Presidents Of The United States of America) : C'est un des meilleurs groupes que j'ai jamais vu. La première fois, c'était en 1982. J'allais voir Killing Joke, et ils ouvraient. J'avais entendu leur Ep, Men In Motion. Bill Rieflin avait ce fantastique son de caisse claire. Ils étaient juste incroyables. Et Eric, le chanteur, était un énorme frontman. Ils ont éclaté Killing Joke.

Bill Rieflin : Notre manager de l'époque bossait au Showbox Theater, et ils faisaient venir un paquet de groupes de renommée nationale et internationale. Ce qui fait qu'on ouvrait souvent pour ce genre de groupe. En un sens, ça ne nous a pas rendu vraiment populaires. on jouait beaucoup et on était très bon en live - on n'a juste pas fait beaucoup de disques.

Larry Reid : Malheureusement, c'est au moment ou ils ont atteint une sorte de pic artistique qu'ils ont quitté la ville. Ça a laissé un vide, qui a été comblé immédiatement par des groupes au style plus proche de ce qu'on défini habituellement par "grunge"

The Blackouts bougent alors jusqu'à Boston, prétextant que la côte Est pourra les aider à accéder à une plus grande popularité. Ils s'acoquinent alors avec le tout nouveau label Wax Trax (devenu légendaire depuis, ayant signé la crème de tout ce qu'on nomme no wave, punk ou indus dans les années qui suivirent : Front 242, KMFDM, Front Line Assembly, Young Gods, et tout ce que les membres de Ministry comptent de projets parallèles), pour signer l'Ep Lost Soul's Club avec un petit jeunot qui débute à la production : Al Jourgensen. Le groupe signe quelques concerts toujours aussi outrageux à New York et Philadelphie. C'est lors de l'un d'eux qu'ils font fureurs en se déguisant tous en juifs hasidiques, à l'exception de Roland Barker, habillé en officier nazi.

Bill Rieflin : L'idée qu'on avait en venant sur la cote Est était de jouer sur New York, mais de vivre à Boston, ou la vie était moins chère. C'était juste horrible. On a juste joué deux ou trois fois à New York. On était tous ensemble dans un tout petit appartement avec des cafards 50000 fois plus nombreux que nous. Je me faisais 60$ la semaine à vendre des muffins avec des ados dans la rue. On a probablement juste écrit 5 morceaux en tout et pour tout quand on était là bas.

Paul Barker : On a vécu un couple d'année à Boston, on jouait à droite à gauche. Mais petit à petit on s'est tous plus ou moins laissé enfermé dans le quotidien, et pour finir on pensait plus à savoir comment payer notre loyer qu'à faire tourner le groupe. On a pensé que si ça devait se passer comme ça, pourquoi ne pas choisir de vivre dans un endroit où on a vraiment envie de vivre. On a bougé à San Francisco. Chacun a essayé de se trouver un job, et on s'est mis à faire quelques concerts. Mais est arrivé un moment ou plus rien ne se passait pour nous. Même si on appréciait tous ce groupe, le groupe en lui même n'avait plus assez d'énergie. Il y avait comme un sentiment d'apathie - on a splitté.

C'est à ce moment qu'Al Jourgensen, qui vient de sortir en solo le premier album de Ministry (Twitch), chez Wax Trax, et qui cherche des musiciens pour partir en tournée, recontacte Paul Barker. Alors que les Blackouts avaient évolué d'une musique pop avant gardiste vers ce qu'on peut qualifier de noise expérimental, Jourgensen, quand à lui, cherche à faire évoluer son bébé, Ministry, vers quelque chose de plus "in your face", un nouveau son noise hardcore teinté d'éléctronique... Ministry était en quelque sorte une suite logique pour les ex-membres des Blackouts. Paul Barker deviendra l'alter ego de Jourgensen au sein du groupe, pour ce qui en deviendra la période la plus aboutie, alors que Bill Rieflin en assurera officieusement la batterie (il n'est crédité souvent que dans les guest) jusqu'au milieu des 90's, avant d'aller rejoindre REM en 2003 jusqu'à leur séparation en 2011. Il collaborera aussi avec Robert Fripp de King Crimson ou Scott Mc Caughey des Young Fresh Fellows.

Paul Barker : Quand on vivait à Boston, on a rencontré Al Jourgensen - il avait produit un Ep pour le groupe. Je suis resté en contact avec lui, et après Twitch, il voulait qu'on monte un vrai groupe ensemble. Donc j'ai demandé à Bill Rieflin et Roland Barker - et nous sommes tous les trois parti en tournée avec Ministry en 1986

En 2004, K Records a sorti un best of retraçant l'ensemble de la carrière des Blackouts : History in Reverse...

Ben Shepherd (bassiste de Soundgarden) : Un de mes groupes préférés était les Blackouts. C'est un disque que tu dois trouver (History In Reverse).

Paul Barker : Un jour que j'étais en ballade avec Kim Thayil, il m'a dit : "Je me souvient du dernier concert des Blackouts au Lincoln Hall de Seattle - c'était vraiment triste. J'étais là bas avec mes amis et tout le monde était vraiment bouleversé. Je lui ai répondu : "Ah bon? Je pensais que tout le monde s'en foutait"

Une vidéo originale de 1982 pour la promotion du single Idiot pour Wax Trax, un peu kitch, qui témoigne bien du penchant artistique des bonhommes... Son un peu pourri cependant, z'ont l'air d'un groupe de midinettes. Le même morceau avec du vrai son et un groove autrement meilleur, accompagné d'un autre, tout aussi excellent, dans la playlist Grooveshark à droite... Une vidéo de Ministry période Barker / Rieflin en sus : NWO avec un fourre tout d'images live... Bien puissant... Ministry c'est des contemporains des groupes de Seattle, ils ont percés en même temps et c'est un peu hallucinant de voir que c'est un groupe qui est, encore une fois, composé de natifs de Seattle. Imaginez la prépondérance de la sub culture seattlelienne au Lollapalooza 91 avec Soundgarden, Pearl Jam, Ministry ou le Jim Rose Circus!!!